DG PLF 2018 – Mission solidarité, insertion et égalité des chances
Lundi 13 novembre 2018
Madame la Présidente, Madame la Ministre, Mesdames les Secrétaires d’État, Madame la Présidente de la Commission des Affaires Sociales, Messieurs les Rapporteurs, chers Collègues en vos grades et qualités.
« La pauvreté ne se choisit pas, mais elle peut se garder » nous prévient Albert Camus !
8.8 millions de pauvres, 14.1% de la population dont près de 20% ont moins de 18 ans et près de 36% sont des familles monoparentales. En 2012 une étude de l’insee pointait que sur cinq années, un tiers des français a été concerné par la pauvreté. Un tiers donc a subi une violation de ses droits humains fondamentaux : ceux d’une égale dignité tant individuelle que collective. 1/3 a traversé « cet exil intérieur qui sépare des millions d’hommes de leur propre pays ». Point d’égalité et de liberté sans fraternité : ce respect mutuel de toutes et tous, cette solidarité républicaine active qui permet de sortir de cette scandaleuse misère du monde.
Avec 19.2 Md€ de crédits, ce budget « solidarité, insertion et égalité des chances » en hausse de près de 8.6% par rapport à 2017 affirme notre responsabilité mutuelle à lutter contre la pauvreté et pour notre cohésion sociale.
Notre groupe démocrates et apparentés, nous démocrates sociaux approuvons les deux logiques qui le sous-tendent.
En premier lieu, il pérennise et approfondit des mesures de justice sociale et des mesures d’égalité que nous saluons.
Je citerai principalement la hausse de la prime d’activité pour soutenir le pouvoir d’achat des travailleurs pauvres. Ce sont 2.6 millions de foyers dont 15.5% ont entre 18 et 24 ans, touchant actuellement en moyenne 160€ de prime d’activité et qui verront ce montant croitre de 20€ par mois pour atteindre jusqu’à 80€ par mois au niveau du SMIC au cours du quinquennat. Ce quinquennat sera celui du pouvoir d’achat.
Cela concerne également les aides aux politiques d’insertion des départements avec la dotation exceptionnelle de 50M€ et 143M€ de crédits de paiement accordés pour prendre en charge, à titre exceptionnel, une partie des surcoûts de l’aide sociale à l’enfance.
Enfin, ce budget sanctuarise les crédits en faveur de l’égalité femmes hommes pour financer entre autres des actions de promotion des droits, la prévention et la lutte contre les violences sexuelles et sexistes.
En second lieu, cet exercice budgétaire pose les bases d’une convergence des minima sociaux, par le haut, que nous souhaitons encourager. Elle vise en effet à faire en sorte que plus personne en France ne vivent en deçà du seuil de pauvreté.
Nous nous félicitons d’avoir été entendus sur plusieurs points de vigilance soulevés en commission permettant notamment d’éviter toute rupture de droits consécutives à la modification du plafond de ressources pris en compte pour le calcul de l’AAH des couples. Ainsi l’allocation adulte handicapé AAH qui bénéficie à 1.1 millions de personnes sera revalorisée et portée à 860€ dès le 1er novembre 2018 et à 900€ en 2019, soit un effort de 2 Md€ sur le quinquennat. A taux plein, son montant rejoindra celui de minimum vieillesse qui atteindra 903€ en 2020.
Par ailleurs, les droits des bénéficiaires du complément de ressources supprimés en 2019 seront maintenus.
Cependant, notre groupe, favorable au versement social unique, estime que la lutte contre les taux de non recours des prestations sociales, est une condition sine qua non de notre solidarité. Ainsi, nous demandons par voie d’amendement que le gouvernement revienne sur la suppression du bénéfice de la prime d’activité aux salariés touchant une rente AT-MP ou une pension d’invalidité au motif que le taux de recours est trop faible. Nous pensons que des actions d’information auprès des publics concernés doivent être préalablement entreprises avant d’envisager des réajustements.
Vous le savez, notre groupe entend peser assurément sur les débats budgétaires et renouveler l’exercice afin d’en être pleinement acteurs.
Dans cette perspective, je souhaite ouvrir deux pistes de réflexion.
Il y a d’abord la question du handicap et plus largement comment notre obsession de la norme et de la normalisation conduit à produire de l’exclusion. Cela se vérifie tout particulièrement pour les politiques autour du handicap qui échouent pour une part à transformer notre regard sur le handicap, ramenant l’autre à son « déficit », son « incapacité » ou sa « inaptitude ». Je crois ainsi nécessaire d’oser le changement de paradigme et favoriser la convergence des dispositifs spécifiques – et notamment financiers – aux personnes handicapées et aux personnes âgées dépendantes, réforme maintes et maintes fois reportées.
Il est un autre sujet qui me tient particulièrement à cœur la lutte contre la maltraitance à l’encontre des personnes en situation de fragilité. Il ne s’agit pas tant d’inventer une politique de la bientraitance ou de prétendre réapprendre aux soignants, aux aidants, la bienveillance – alors qu’ils sont déjà pris d’épuisement psychique et physique – mais il importe de comprendre d’un point de vue systémique comment ces gouvernances produisent ce coût de la maltraitance. Il s’agit d’établir des balises de sauvetage de sens, en reposant à chaque instant la question humaine, de la conception à l’évaluation des politiques publiques, en impliquant à chaque étape les praticiens, les usagers et les citoyens pour une véritable approche humaniste, c’est-à-dire pour mettre l’homme au centre de nos pratiques, en tout cas pour une approche centrée sur la personne.
Je vous remercie.
Brahim Hammouche
Député de Moselle